C'est en Genèse 14.13 que le terme “hébreu” apparaît pour la première fois : ”Un fuyard vint annoncer à Abram, l'hébreu...” Selon la racine de ce mot, il pourrait être traduit par “l'étranger” voire “le migrant”. Dans l'Exode, la fille du pharaon découvre un bébé au bord du Nil, et elle discerne que c'est un hébreu, un enfant du peuple réduit en esclavage par son propre père. Selon les commentateurs juifs, le terme “hébreu” évoque, à l'origine, le réfugié, l'étranger, celui qui se trouve dans une situation sociale d'infériorité, celui que l'on peut regarder de haut et mépriser. C'est une appellation péjorative. Il faudra attendre longtemps pour que les Hébreux transforment ce titre dévalorisant en titre de noblesse à l'instar de l'apôtre Paul, fier d'être “Hébreu né d'Hébreu”. Transformer le négatif en positif, c'est une forme de résilience et de victoire sur soi. Il est intéressant de noter que les premiers chrétiens ont connu le même sort et le même cheminement. Surnommés “petits-Christ”, chrétiens, terme alors malveillant et dépréciatif à l’égard de ceux qui adoptaient “la voie” (Ac 11.26), ce sobriquet devient un titre de dignité, une dénomination honorable que l'on porte soudain avec fierté. C'est un renversement total de valeurs et c'est surtout une victoire sur l'humiliation, une capacité à rebondir, à se relever après l'outrage et le mauvais traitement. Combien de fois la Bible parle-t-elle de celui qui est opprimé et qui se relève ? Du blessé qui se redresse ? Du pauvre qui se tient debout ? Du paralysé qui se lève ? Un mouvement dont parle le psalmiste : “Il m'a retiré de la fosse de destruction, du fond de la boue : Il a dressé mes pieds sur le roc ; Il a affermi mes pas.” (Ps 40.2) Il n'est pas toujours facile d'être chrétien, et parfois, être repéré comme tel est suivi de mépris, de défiance, de jugement négatif. Mais le chrétien porte le nom le plus précieux qui soit et doit en être fier et reconnaissant. Surtout reconnaissant et honoré.
